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\begin{document}
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{~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~Acte 4\\
(Chez Bichat. M\^eme d\'ecor qu'au second acte. Sur la petite table qui occupe le milieu de salon, il y a la jardini\`ere de Quimper, h\'eriss\'ee de hautes fleurs artificielles et fris\'ees, piqu\'ees dans la mousse.)\\
\\
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~Sc\`ene 1\\
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~Bichat, Mariette.\\
(Mariette se tient debout pr\`es de la table, les yeux sur une lettre ouverte devant elle. Bichat arpente nerveusement la sc\`ene.)\\
~~~Bichat. C'est insens\'e! A quelle heure as-tu re\c{c}u ce pneumatique?\\
\\
pneumatique~~~気送速達\\
\\
~~~Mariette. A deux heures et demie. Je finissais de ranger la vaisselle et j'allais partir. Je suis rest\'ee.\\
~~~Bichat. Tu es rest\'ee. Mais voyons, tu avais une forte raison de plus pour t'en aller et pour ne rentrer que le plus tard possible!\\
~~~Mariette. J'ai voulu attendre. Je savais que vous deviez arriver entre quatre et cinq heures. J'ai pens\'e que je ne devais pas vous exposer \`a le recevoir en mon absence.\\
~~~Bichat. Mais je ne l'aurais pas re\c{c}u! Il n'aurait pas franchi la porte. Ah! il est vraiment regrettable que ce pneu ne soit pas arriv\'e un peu plus tard. J'aurais pu le rendre \`a Tabaroux, non d\'ecachet\'e, de ta part.\\
\\
d\'ecachet\'e~~~開封する\\
\\
~~~Mariette. \c{C}a n'aurait pas \'et\'e vrai.\\
~~~Bichat. Malheureusement! (Il consulte sa montre.) Encore heureux que nous arrivions \`a temps. Tout se passera comme si tu \'etais \`a Joinville. Nous lui dirons que tu n'es pas l\`a, que tu ne tiens pas \`a le voir, et nous lui fermerons la porte au nez.\\
~~~Mariette. Mais je ne refuse pas de le voir! Je ne veux pas avoir l'air de le fuir. Il ne me fait pas peur!\\
~~~Bichat. Admirable! Tu es \`a sa disposition. Et bien, ma petite, tu lui fixeras un rendez-vous si tu veux, \`a Saint-Ouen ou ailleurs, mais pas ici! Tabaroux ne m'imposera pas sa pr\'esence! Ah! tu vas entendre ta soeur!\\
~~~Mariette. O\`u est-elle?\\
~~~Bichat. Elle monte derri\`ere moi, je te l'ai dit. Elle s'est arr\^et\'ee chez l'\'epicier. (Il consulte sa montre.) Quand je pense que dans une demi-heure, un quart d'heure peut-\^etre, nous entendrons le coup de sonnette du sieur Tabaroux! (Un temps.) Mais, au fait, tu avais rendez-vous avec Gu\'eridon \`a la porte de Vincennes.\\
~~~Mariette. Oui.\\
~~~Bichat. Alors?\\
~~~Mariette. Je n'y suis pas all\'ee. Il n'\'etait pas tr\`es s\^ur de pouvoir m'accompagner \`a Joinville. Nous ne devions pas nous attendre plus d'un quart d'heure.\\
~~~Bichat. Tu avais tout de m\^eme bien le temps d'aller le pr\'evenir!\\
~~~Mariette. Je n'ai pas voulu.\\
~~~Bichat. Tu avais peur qu'il ne t'emp\^ech\^at de voir Tabaroux, hein?\\
~~~Mariette. Il ne m'en aurait pas emp\^ech\'ee, mais il aurait essay\'e, oui et \c{c}a m'aurait d\'eplu. Je sais ce que j'ai \`a faire.\\
~~~Bichat, (avec \'eclat.) Et quand c'est une sottise, tu n'h\'esites pas!\\
(L\'ontine entre, un paquet d'\'epicerie \`a la main.)\\
\\
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~Sc\`ene 2\\
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~Les m\^eme, L\'eontine.\\
~~~L\'eontine. Qu'est-ce qu'il y a? Mariette, tu es d\'ej\`a rentr\'ee?\\
~~~Bichat. Ah! elle va te dire, ce qu'il y a!\\
~~~Mariette. Je ne suis pas all\'ee \`a Joinville, parce que j'ai re\c{c}u un pneumatique d'Henri. (Elle prend la lettre sur la table.)\\
~~~L\'eontine. Qu'est-ce qu'il veut?\\
~~~Bichat, (allant \`a Mariette.) Voil\`a, ce qu'il veut. (Il prend la lettre, des mains de mariette.) Veux-tu me permettre? (Il lit \`a haute voix.)\\
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~Ma ch\`ere Mariette,\\
"Quand tu m'as \'ecrit pour m'annoncer que tu ne voulais plus vivre avec moi, j'ai pas r\'epondu parce qu'il n'y avait rien \`a r\'epondre. Tu fais ce que tu veux. J'aime trop la libert\'e pour ne pas respecter celle des autres. Mais puisque me voici rentr\'e chez moi, je veux, le plus vite possible, r\'egler un compte avec toi. L'argent que j'avais pr\^et\'e vient de m'\^etre rendu. Comme c'\'etait celui de la communaut\'e, la moiti\'e t'appartient. J'irais te le porter aujourd'hui vers cinq heures, chez ta soeur. Si tu n'\'etais pas l\`a, je reviendrais (il a \'ecrit je reviendrai, sans s) jusqu'\`a ce que je puisse te remettre la somme en main propre. Henri."\\
Voil\`a!\\
~~~L\'eontine. Par exemple! Qu'est-ce que cela signifie?\\
~~~Mariette. Tu en sais autant que moi.\\
~~~Bichat. \c{C}a signifie que dans vingt minutes, ce beau monsieur sera plant\'e sur notre paillasson.\\
\\
paillasson~~~靴拭きマット\\
\\
~~~L\'eontine, (v\'eh\'emente.) Ah! nous ne le recevrons pas! Nous ne lui ouvrirons pas!\\
~~~Bichat. Bien entendu.\\
~~~Mariette. J'irai l'attendre en bas, \`a la porte.\\
~~~L\'eontine, (suffocant.) Tu?.. Mais tu es folle!\\
~~~Bichat. Elle est plut\^ot d'une candeur, pour ne pas dire plus!...\\
~~~L\'eontine, (\`a Mariette.) Alors tu t'imagines vraiment qu'il va t'apporter de l'argent et te tirer sa r\'ev\'erence?\\
\\
r\'ev\'erence~~~お辞儀\\
\\
~~~Bichat. Tu ne sens pas qu'il y a un pi\`ege l\`a-dessous? Que l'argent n'est qu'un pr\'etexte?\\
~~~Mariette. Un pr\'etexte? Pour quoi faire?\\
~~~L\'eontine. Mais, petite gourde, pour essayer de te reprendre, avec des boniment ou des menaces! Tu ne sais pas qu'il a besoin de quelqu'un pour faire son lit et sa popote?\\
\\
popote~~~料理\\
\\
~~~Bichat. Ta part de cet argent! D'abord elle sera ce qu'il voudra, et tu peux \^etre assur\'ee qu'il ne te la donnera que si tu veux bien rentrer avec elle dans le m\'enage.\\
~~~Mariette, (calmement.) Il n'en est pas question dans sa lettre. Il me r\'ep\`ete une fois de plus que je fais ce que je veux.\\
~~~L\'eontine. On ne prend pas les mouches avec du vinaigre.\\
~~~Bichat. Il essait de te faire marcher, voyons!\\
~~~Mariette. Je verrai, mais je ne crois pas. D'apr\`es ce qu'il m'a \'ecrit...\\
~~~L\'eontine. Comment peux-tu avoir encore la moindre confiance en lui?\\
~~~Mariette. Il m'a tromp\'ee en me taisant des choses, mais il a toujours fait ce qu'il a dit. Et je sais qu'il est beaucoup trop fier pour me demander de retourner avec lui. (Trahissant un peu d'\'emotion.) L\`a-dessus vous vous trompez compl\`etement.\\
~~~Bichat. Eh bien, s'il est fier, permets-moi de te dire que toi, tu ne l'es gu\`ere. Il te fait savoir \`a deux heures et demie qu'il sera ici \`a cinq heures avec de l'argent, et pour un peu, tu irais au-devant de lui.\\
~~~L\'eontine. C'est effarant!\\
\\
effarant~~~驚くべき\\
\\
~~~Mariette. Si je veux bien le voir, ce n'est pas \`a cause de l'argent! Je le refuserai, ce maudit argent.\\
~~~L\'eontine. Alors, je ne comprends plus du tout.\\
~~~Mariette. C'est en me d\'efilant que je manquerais de fiert\'e, de cran. J'aurais l'air d'avoir peur de lui.\\
\\
d\'efilant~~~疑う、警戒する\\
cran~~~大胆さ\\
\\
~~~Bichat. C'est absurde! Ton abstention ne serait pas une d\'erobade. Et la m\'efiance n'est pas la peur.\\
\\
abstention~~~回避\\
d\'erobade~~~しりごみ、逃避\\
\\
~~~Mariette. Mais encore une fois je n'ai pas \`a me m\'efier. Je ne sais pas si Henri a vraiment pr\^et\'e de l'argent, si on le lui a rendu, mais je sais qu'il veut m'en apporter.\\
~~~L\'eontine, (ironique.) Honn\^etement.\\
~~~Mariette. Peut-\^etre, mais orgueilleusement surtout. Et moi, je veux lui dire que c'est trop tard; que son argent d'aujourd'hui ne peut remplacer celui qui manquait \`a la maison il y a trois mois, six mois et plus.\\
~~~Bichat, (consultant sa montre.) Oui. Eh bien, tu lui diras cela chez lui ou ailleurs, mais pas ici et pas aujourd'hui. Je vais fixer sur la porte et sous enveloppe au nom de Tabaroux un billet ainsi con\c{c}u: Mariette est absente, elle vous \'ecrira pour vous fixer un rendez-vous.\\
~~~L\'eontine, (approuvant.) Voil\`a! Mais apr\`es: Mariette est absente, il faut ajouter: Vous oubliez qu'elle n'habite pas ici chez elle, mais chez ceux que vous avez injuri\'es. Ou quelque chose comme \c{c}a.\\
~~~Bichat. Moi, je pr\'ef\'ererais le calme et la dignit\'e.\\
~~~L\'eontine. Voyons, D\'ed\'e, nous ne devons pas laisser passer cette insolence, cette fa\c{c}on de venir ici, d'autorit\'e...\\
~~~Bichat. Bon, bon. (Il va s'asseoir \`a un petit secr\'etaire et tire d'un sous-main une feuille de papier.)\\
\\
sous-main~~~デスクパッド\\
\\
~~~L\'eontine, (poursuivant.) C'est un comble! \c{C}a ne para\^it pas t'avoir soulev\'ee d'indignation, toi, Mariette!\\
~~~Mariette, (qui jusque-l\`a est rest\'ee ferm\'ee.) Ecoutez: inutile de mettre aucun paier sur la porte. Je vous l'ai d\'ej\`a dit, je vais descendre. Je l'attendrai dans la rue. Comme \c{c}a...\\
~~~Bichat. Ah! l\`a l\`a!\\
~~~L\'eontine. Comme \c{c}a il comprendra que nous t'avons envoy\'ee l'attendre dans la rue, que tu n'es pas ici comme chez toi.\\
~~~Mariette. C'est exactement ce que tu veux lui \'ecrire toi-m\^eme sur la porte: Vous oubliez que Mariette n'est pas ici chez elle!\\
~~~Bichat. Titine a voulu dire: Vous oubliez que Mariette n'est pas seule ici chez elle.\\
~~~L\'eontine, (emphatique.) Mariette! Tu le sais pourtant bien que tu es ici chez toi! Nous te l'avons assez dit et prouv\'e! Comment peux-tu m'obliger \`a te rappeler tout ce que nous avons fait pour toi, et que nous allons encore faire, pour ta tranquillit\'e, ton bien-\^etre, ton bonheur! Mais nous ne pouvons tout de m\^eme pas aller nous enfermer dans notre chambre tandis que tu recevras ici cet homme indigne de toi et de nous.\\
~~~Bichat. S'il a vraiment de l'argent \`a te remettre, il n'a qu'\`a te l'envoyer par mandat. Voil\`a ce que tu dois lui \'ecrire, Mariette. Et pour le moment sortons tous les trois; ne mettons rien sur la porte. Il trouvera la maison vide. (Il consulte sa motre) C'est encore la meilleure solution.\\
~~~Mariette. Et s'il revient ce soir? Il a dit qu'il reviendrait s'il ne me trouvait pas.\\
~~~Bichat, (allant prendre la lettre et lisant.) Voyons. (Il cherche le passage et lit.) "Si tu n'\'etais pas l\`a, je reviendrais jusqu'\`a ce que je puisse te remettre la somme en main propre". Charmant!\\
~~~L\'eontine. C'est inimaginable! (A sa soeur.) Ah! il nous en aura fait voir, ce Tabaroux!\\
~~~Mariette. Vous voyez bien que, pour votre tranquillit\'e...\\
~~~L\'eontine, (l'interrompant.) Il faut dire aussi que tu t'es montr\'ee d'une mollesse, d'une faiblesse, d'une complaisance! Nous en aurions fini et bien fini avec lui depuis longtemps si tu n'\'etais pas all\'ee le voir, si tu lui avait \'ecrit tout de suite, comme je te l'ai conseill\'e.\\
~~~Mariette. Il aurait voulu quand m\^eme me rendre cet argent.\\
~~~L\'eontine. Cet argent, que tu croiras bien malin de refuser, n'est-ce pas? Tu en a tellement!\\
~~~Bichat. D'ailleurs, c'est un conte \`a dormir debout. Il n'a pas d'argent.\\
~~~Mariette. Je vous dis que si.\\
~~~L\'eontine. Alors c'est qu'il jouait; ou qu'il avait engag\'e ses sous dans une combinaison plus ou moins louche et qui a r\'eussi par miracle. C'est possible. On peut s'attendre \`a tout avec lui. Eh bien, Mariette, si cet argent existe vraiment, tu n'as pas le droit de le refuser! Si nous n'\'etions pas l\`a tout de m\^eme! Tu ne ferais pas tellement la d\'edaigneuse, hein? Nous allons t'assurer un logement, c'est entendu, mais nous ne pouvons que t'avancer les frais d'installation, tu as toi-m\^eme insist\'e pour qu'il en soit ainsi...\\
\\
louche~~~いかがわしい\\
d\'edaigneuse~~~軽蔑的な、尊大な\\
\\
~~~Mariette, (l'interrompant, exc\'ed\'ee.) Oui, oui, tu as raison! Tu as mille fois raison! Je ne refuserai rien. Et je vais donc descendre. Il n'y a pas autre chose \`a faire. (Elle va r\'esolument vers la porte.)\\
~~~L\'eontine. (apr\`s un moment de perplexit\'e, courant apr\`es Mariette et la ramenant.) Eh bien non, tu ne descendras pas! J'en aurais honte pour toi! Je ne veux pas pour ma soeur d'une humiliation, qui rejaillirait sur nous.\\
\\
rejaillirait~~~(水などが)跳ね返る\\
\\
~~~Bichat. Alors?\\
~~~L\'eontine. Il faut que Tabaroux la trouve install\'ee dans notre confort. Surtout s'il lui apporte de l'argent! Je veux qu'il ait bien l'impression qu'elle pourrait s'en passer. Allons faire un tour, laissons-la ici.\\
~~~Bichat, (approuvant.) \c{C}a n'est pas si b\^ete.\\
~~~L\'eontine. Puisqu'il faut en finir, puisqu'elle veut absolument le voir, eh bien elle le recevra dans son nouveau foyer. Etant bien entendu que nous sommes sortis expr\`es, avant qu'il n'arrive. Tu le lui diras, Mariette!\\
~~~Mariette. Ce n'est pas \`a vous de vous en aller.\\
~~~Bichat, (grand seigneur.) Si! Titine a raison. Nous allons donner une le\c{c}on de savoir-vivre \`a ce malotru. Et dans la mesure o\`u nous sommes tes h\^otes, Mariette, nous te c\'edons la place, comme il se doit!\\
\\
malotru~~~無作法な人\\
\\
~~~L\'eontine. C'est \`a toi que nous la c\'edons; pas \`a lui.\\
~~~Mariette, (avec lassitude.) Bon, si vous voulez.\\
~~~L\'eontine. Mais, je t'en prie, que cette liquidation ne tra\^ine pas! Dis-lui que nous allons revenir dans dix minutes!\\
~~~Mariette. Vous revenez dans dix minutes?\\
~~~Bichat. Penses-tu! Nous allons tranquillement prendre l'ap\'eritif sur les boulevards!\\
~~~L\'eontine, (pin\c{c}ant Bichat \`a la d\'erob\'ee.) Mais non! Nous faisons un tour d'une demi-heure au plus. Et je pense m\^eme \`a une chose, Mariette: cinq minutes apr\`es qu'il sera parti, ouvre la fen\^etre toute grande. \c{C}a voudra dire que nous pouvons remonter.\\
~~~Mariette. C'est entendu.\\
~~~Bichat, (consultant sa montre.) Et maintenant, allons! Nous finirons bien par le croiser dans l'escalier. Moi, si je le rencontre et qu'il me dise un mot de travers, je lui casse la figure. (Il va dans le vestibule.)\\
~~~L\'eontine. Ne dis donc pas de b\^etise. Tu passeras ton chemin. Tu ne vas tout de m\^eme pas te battre avec lui! D'abord il est plus fort que toi. A tout \`a l'heure, Mariette.\\
~~~Mariette. A tout \`a l'heure.\\
~~~L\'eontine, (avant de sortir.) Sois calme, sois ferme et prends l'argent comme ton d\^u.\\
~~~Bichat, (r\'eapparaissant avec son chapeau sur la t\^ete.) Et exp\'edie-le en vitesse, hein!\\
~~~Mariette. J'ouvrirai la fen\^etre apr\`es qu'il sera parti.\\
\\
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~Sc\`ene 3\\
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~Mariette, puis Gu\'eridon.\\
(Rest\'ee seule, Mariette demeure un instant immobile et comme alert\'ee. Puis elle va se regarder dans une glace, rectifie coiffure et toilette, inspecte ensuite le petit salon, dispose deux si\`eges, avise soudain, sur la petite table de milieu, la jardini\`ere et ses fleurs artificielles et, l'ayant saisie, fait un pas vers la salle \`a manger. Mais elle se ravise et replace l'objet sur la table en disant: \textit{Et puis, non, qu'elle reste}. Elle contemple alors cette jardini\`ere et en \^ote deux ou trois fleurs particuli\`erement laides et criardes. Mais cela n'arrange rien \`a son gr\'e. Elle remet les fleurs \`a leur place et dit: \textit{Non}. Elle emporte alors la jardini\`ere dans la salle \`a manger. Au moment o\`u elle revient, on sonne. Elle va ouvrir.)\\
\\
criardes~~~騒々しい、やかましい\\
\\
~~~Mariette, (en coulisse.) Ah! c'est vous?\\
~~~Gu\'eridon, (de m\^eme.) Mais voyons ma petite Mariette, que se passe-t-il? (Il entre suivi de Mariette et jette son chapeau sur une chaise.) Je vous ai attendue vingt minutes au m\'etro, puis je suis all\'e \`a Joinville o\`u je suis rest\'e une heure en t\^ete \`a t\^ete avec le marmot.\\
\\
marmot~~~子供\\
~~~~~~croquer le marmot~~~待ちあぐむ\\
\\
~~~Mariette. Je n'y suis pas all\'ee; je ne pouvais pas. Et je vous prie de m'excuser, mais il ne faut pas que vous restiez ici...\\
~~~Gu\'eridon. Ah! mon Dieu, je vois, je vois! C'est bien ce que je pensais!\\
~~~Mariette. Quoi? Qu'est-ce que vous pensiez?\\
~~~Gu\'eridon. Je vous jure, Mariette, que cette femme ne m'est rien, absolument rien. Une relation. Une relation utile!\\
~~~Mariette. Quelle femme?\\
~~~Gu\'eridon. Allons, vous savez bien! Celle avec qui vous m'avez vu hier dans le m\'etro, mais je ne vous ai pas vu.\\
~~~Mariette. Hier? Oui, j'ai bien pris le m\'etro, mais je ne vous ai pas vu.\\
~~~Gu\'eridon. Sans blague!\\
~~~Mariette. Je vous jure! Ecoutez: Il ne faut pas que vous restiez ici. J'attends mon mari.\\
~~~Gu\'eridon, (sursautant.) Tabaroux?\\
~~~Mariette. Il m'a envoy\'e un pneumatique pour me dire qu'il serait ici \`a cinq heures.\\
~~~Gu\'eridon. Par exemple. (Il tire sa montre.) Mais il va \^etre cinq heures! Ne le recevez pas! Ne lui ouvrez pas! Ou si vous voulez c'est moi qui lui ouvrirai. Je vous garantis qu'il n'entrera pas ici.\\
~~~Mariette, (doucement.) Il faut que je le re\c{c}oive. L\'eontine et Andr\'e viennent de partir pour me laisser seule. Il s'agit d'une derni\`ere entrevue. Henri admet tr\`es bien la s\'eparation, mais il veut me remettre ma part de l'argent qu'il avait pr\^et\'e et qu'on lui a rendu.\\
~~~Gu\'eridon. Vous croyez que c'est vrai?\\
~~~Mariette. Oui, c'est vrai, et je n'ai rien \`a craindre.\\
~~~Gu\'eridon. Je vais aller m'enfermer dans votre chambre ou dans la cuisine.\\
~~~Mariette. Oh! non, partez! Je ne pourrais pas vous sentir l\`a. J'ai besoin d'\^etre calme: partez vite! (On sonne.)\\
~~~Gu\'eridon. Bon Dieu! le voil\`a! (Il court vers la porte de gauche.)\\
~~~Mariette, (imp\'erative.) Non!\\
~~~Gu\'eridon, (revenant.) Alors, je suis venu pour voir Andr\'e. Vous ne me connaissez pas. Je suis en train de prendre cong\'e. Je dirai ce qu'il faut, allez ouvrir, allez!\\
~~~Mariette. C'est cela. (Elle va ouvrir. Gu\'eridon, son chapeau \`a la main, prend l'attitude u peu c\'er\'emonieuse d'un \'etranger.)\\
\\
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~Sc\`ene 4\\
~~~~~~~~~~~~Gu\'eridon, Mariette, Tabaroux. puis les M\^eme, moins Gu\'eridon.\\
~~~Tabaroux, (en coulisse.) Bonjour, Mariette.\\
~~~Mariette, (de m\^eme.) Bonjour, Henri, entre.\\
(Suivi de Mariette, Tabaroux entre, un paquet \`a la main. Gu\'eridon lui fait un l\'eger salut de la t\^ete.)\\
~~~Tabaroux, (surpris, rendant le salut.) Monsieur!.. (Il avance vers le milieu de la pi\`ece.)\\
~~~Gu\'eridon, (\`a Mariette.) Alors, Mademoiselle, vous serez bien aimable de lui dire que c'est son vieil ami Tony qui est venu, croyant bien le trouver un samedi, \`a cette heure-ci; et que je lui \'ecrirai pour lui demander un rendez-vous. Tony, vous vous rappelerez?\\
~~~Mariette. Mais oui, Monsieur.\\
~~~Gu\'eridon, (sortant.) Excusez-moi et ne vous d\'erangez pas, je connais la maison. (Mariette le reconduit.) Au revoir, Mademoiselle!\\
~~~Mariette, (en coulisse.) Au revoir, Monsieur. (Elle revient.)\\
~~~Tabaroux. Qui est-ce?\\
~~~Mariette. Je ne sais pas, un ami d'Andr\'e.\\
~~~Tabaroux. Tu es seule?\\
~~~Mariette. Oui, L\'eontine et Andr\'e viennent de s'en aller parce que tu allais venir.\\
~~~Tabaroux. Trop aimables.\\
~~~Mariette. Assieds-toi.\\
~~~Tabaroux. J'ai pens\'e que tu ne voudrais pas aller \`a Saint-Ouen et que, si je te demandais un rendez-vous, je risquais d'attendre longtemps.\\
~~~Mariette. Non, pourquoi?\\
~~~Tabaroux. En tout cas, c'\'etait \`a moi de me d\'eranger. S'il n'y avait eu que l'argent, j'aurais pu te l'envoyer. Mais il ya a aussi cela. (Il montre son paquet.) Il fallait que je te l'apporte. (Il lui tend le paquet.)\\
~~~Mariette. Qu'est-ce que c'est? (elle prend le paquet.)\\
~~~Tabaroux. Regarde. C'est une jardini\`ere. Pour que tu ne regrettes pas tellement l'autre. (Il sort son couteau de sa poche et coupe la ficelle.) Je l'ai trouv\'ee, chez un antiquaire. Elle est ancienne; ce n'est pas du Quimper, mais du Nevers. (Mariette a d\'efait le paquet et pose sur la table la jardini\`ere qu'elle contemple avec une \'emotion contenue.) J'en avais bien trouv\'e, du Quimper. Il y en a autant qu'on en veut. Mais \c{c}a, c'est beaucoup plus rare, plus d\'elicat, moins bariol\'e. Dedans, tu pourras pousser des oignons \`a fleurs.\\
\\
bariol\'e~~~塗りたくる、ごたまぜになった\\
oignons~~~球根\\
\\
~~~Mariette. Je te remercie, Henri... Mais tu es fou... C'est bien trop beau, et ce n'\'etait pas la peine.\\
~~~Tabaroux. Si, c'\'etait la peine. Pour moi comme pour toi. Quant aux coquillages, tu auras les moyens d'aller en ramasser toi-m\^eme. Tiens, voil\`a l'argent qui te revient. (Il tire de sa veste une enveloppe qu'il pose sur la table devant Mariette.) Tu peux voir, j'ai marqu\'e la somme sur l'enveloppe.\\
~~~Mariette, (sans bouger, elle regarde l'enveloppe.) Oh! Mais je ne veux pas d'une somme pareille! D'ailleurs, je ne veux rien, Henri, je ne veux rien... Il est bien temps maintenant!\\
~~~Tabaroux, (doucement.) Puisque c'est \`a toi.\\
~~~Mariette. Reprends cet argent!\\
~~~Tabaroux. Jamais de la vie. J'en ai tout autant. Et tu en auras besoin. Ne serait-ce que pour te lib\'erer un peu des Bichat.\\
~~~Mariette, (protestant.) Je suis libre!\\
~~~Tabaroux. Je sais ce que je dis. D'ailleurs, le jeune Bichat va rentrer du r\'egiment. Il aura besoin de sa chambre. Il faudra bien que tu t'installes quelque part.\\
~~~Mariette. Oui. (Un silence. Tabarouix se l\`eve et allume une cigarette.)\\
~~~Tabaroux. Y a-t-il indiscr\'etion \`a te demander ce que tu vas faire?\\
~~~Mariette. Je vais travailler. Je viens de trouver une situation... assez belle. Une place de confiance.\\
\\
de confiance~~~信用のおける\\
\\
~~~Tabaroux, (se dominant.) Ah!... Parfait. \c{C}a va te donner au moins une certaine ind\'ependance... Dans quel genre?\\
~~~Mariette. Dans le commerce, une place de g\'erante. Quand on m'aura mise au courant, je tiendrai toute seule un petit magasin de parfumerie et d'articles de toilette. J'aurai mon logement derri\`ere la boutique, ou au-dessus.\\
\\
g\'erante~~~支配人、管理者\\
\\
~~~Tabaroux, (avec une ironie froide.) Merveilleux... Tu seras toute la journ\'ee derri\`ere un petit comptoir, et tu vendras des peignes, des savons, des brosses \`a dents, des \'epingles \`a cheveux.\\
~~~Mariette, (piqu\'ee.) Des flacons de parfums, des bo\^ites \`a poudre, des fards.\\
~~~Tabaroux. Bien s\^ur. Et le soir, tu fermeras ta boutique et tu n'auras que dix pas \`a faire pour te trouver devant ton r\'echaud \`a gaz.\\
~~~Mariette. Et ce n'est pas ce que j'aurai fait dans la journ\'ee qui m'aura beaucouop fatigu\'ee.\\
~~~Tabaroux. Evidemment! On n'ach\`ete pas une brosse \`a ongles aussi souvent qu'un quart de beurre. \c{C}a ne se mange pas.\\
\\
quart~~~125g、四分の一リーブル\\
\\
~~~Mariette. N'emp\^eche que c'est l'un des commerces o\`u l'on voit le plus de monde.\\
~~~Tabaroux. Enfin, tu es contente. C'est le principal.\\
~~~Mariette. Je suis contente d'avoir cette place, oui. Je ne pouvais en esp\'erer de plus agr\'eable et de plus avantageuse.\\
~~~Tabaroux. C'est ta soeur qui te l'a trouv\'ee? Oui! elle a d\^u conserver des relations dans la p\^ate dentifrice et les lames de rasoir. (Un silence.) Et puis, dis donc, tu auras probablement la client\`ele des coll\`egues de ton beau-fr\`ere... Qui sait, il s'en trouvera bien un, jeune et distingu\'e, pour venir baisser ton rideau de fer, apr\`es son bureau.\\
\\
rideau de fer~~~(店の)シャッター\\
\\
~~~Mariette, (d'une voix \'etrangl\'ee.) Peut-\^etre.\\
~~~Tabaroux. Ne te f\^ache pas, Mariette. C'est pas bien m\'echant, ce que je te dis l\`a. Ta soeur l'a s\^urement r\^ev\'e. (Un temps.) C'est \'egal! Je ne te voyais pas dans un fond de boutique, grignotant tes journ\'ees comme une souris! et trouvant \c{c}a magnifique!\\
\\
grignotant~~~すこしづつ齧る\\
\\
~~~Mariette. Tu me voyais bien \`a Saint-Ouen, dans les raccommodages, la lessive, la vaissselle.\\
\\
raccommodages~~~繕い\\
lessive~~~洗濯\\
\\
~~~Tabaroux. Non, Mariette, non, Mariette, pas davantage et tu le sais bien.\\
~~~Mariette. On peut se plaire dans un emploi qui n'a aucun rapport avec ce qu'on r\^evait. Je suppose que tu es bien oblig\'e de retourner en usine, toi qui parle si bien!\\
~~~Tabaroux. Non! Justement non, je n'y retournerai pas.\\
~~~Mariette. Qu'est-ce que tu vas faire?\\
~~~Tabaroux. Je vais te le dire. Mais avant il faut que tu saches exactement tout, \`a propos de cet argent. Si j'ai voulu te voir, c'est aussi pour cette explication que je te dois. Tu peux m'accorder encore cinq minutes?\\
~~~Mariette. Oui.\\
~~~Tabaroux. Cet argent, Mariette, je ne l'ai pas pr\^et\'e.\\
~~~Mariette. C'est bien ce que je pensais.\\
~~~Tabaroux. Ecoute-moi, je t'en prie. Cet argent, je le mettais \`a la Caisse d'\'epargne. Il devait bien servir comme je te l'ai dit, \`a lib\'erer deux prisonniers, \`a leur permettre de vivre et de respirer! ces deux prisonniers, c'\'etait toi et moi.\\
~~~Mariette, (v\'eh\'emente.) Allons donc! Si tu avais fais cela, pourquoi me l'aurais-tu cach\'e? Pourquoi?\\
~~~Tabaroux, (l'interrompant.) Ecoute-moi, voyons! J'avais un projet. Un projet magnifique, mais dont je ne voulais te faire la surprise qu'au dernier moment, d'autant que c'\'etait long et difficile \`a r\'ealiser. Il fallait amasser de l'argent. Tu n'y aurais peut-\^etre pas cru assez pour t'imposer des sacrifices. Alors, je te les ai impos\'es sans que tu le saches. C'\'etait plus facile et moins p\'enible. On accepte mieux les choses quand on est persuad\'e qu'il n'y a pas moyen de faire autrement. J'avais besoin de toute mon \'energie pour aboutir. Si tu avais \'et\'e au courant, il est probable que nous aurions mis deux fois plus de temps \`a \'economiser cette somme. Tu aurais dit ou j'aurais dit moi-m\^eme: Patientons quelques mois de plus et vivons mieux. Or, moi, je voulais quitter l'usine le plus vite possible. Je n'y tenais plus. Je me connais, je risquais de me mettre en ch\^omage dans un coup de t\^ete et tout \'etait en panne une fois de plus. Et puis, tu en aurais parl\'e \`a ta soeur.\\
\\
coup de t\^ete~~~軽卒な行動\\
\\
~~~Mariette, (protestant.) Oh!\\
~~~Tabaroux. Si. Plus le projet t'aurait emball\'e, plus tu lui en aurais parl\'e, trop contente de lui expliquer le pourquoi de notre r\'egime \`a la mie de pain.\\
\\
emball\'e~~~熱中する、包装する\\
r\'egime~~~生活態度、生活律\\
\\
~~~Mariette. Et alors? C'\'etait donc une chose inavouable?\\
\\
inavouable~~~口に出せない\\
\\
~~~Tabaroux. Pas du tout. J'en ai parl\'e \`a mes meilleurs amis, \`a Emile, \`a F\`ene, \`a Bourdon. Mais tes deux Bichat, ils sont incapables de comprendre l'audace et la fantaisie! Mon programme, ils l'auraient trouv\'e une extravagance, ils se seraient acharn\'es \`a le d\'emolir, ils auraient bav\'e dessus. Et puis, \c{c}a ne les regardait pas.\\
\\
s'acharner~~~激しく攻撃する、熱中する\\
baver~~~けなす\\
\\
~~~Mariette. Je ne leur ai jamais dit des choses qui ne les regardaient pas. Tu t'es toujours fait des id\'ees l\`a-dessus.\\
~~~Tabaroux. Admettons. C'est fini, n'en parlons plus.\\
~~~Mariette. Je peux savoir ce que c'\'etait, ton fameux projet?\\
~~~Tabaroux. Comment donc! J'y arrive. Oh! c'\'etait simple et radical. Nous quittions Saint-Ouen. J'\'equipais pour nous une jolie roulotte automobile comme celle que nous avons vue un jour sur le quai d'Alfort et qui te faisait r\^ever. J'allais faire le r\'emouleur ambulant avec un mat\'eriel tout ce qu'il y a de perfectionn\'e: trois meules diff\'erentes que faisait tourner le moteur de ma voiture; abri d\'emontable, \'eclairage \'electrique. Oh! je ne me baladais pas dans les rues avec une clochette! Je faisais les march\'es; tous les march\'es de France, en commen\c{c}ant par la Normandie. J'aff\^utais surtout pour le commerce. N'emp\^eche que les m\'enag\`eres m'apportaient leurs ciseaux, rien que pour me voir travailler. J'avais combin\'e un truc pour aff\^uter les scies... Toi, tu vendais de la coutellerie que je fabriquais. Des couteaux de poche; un mod\`ele de mon invention. C'\'etait le couteau su\'edois perfectionn\'e, tout ce qu'il y avait de simple, de pratique et d'original. Les gens de la campagne en auraient voulu tous.\\
\\
\'equipais~~~装備する\\
roulotte~~~キャンピングカー、大型トレーラー\\
r\'emouleur~~~巡回の研ぎ師\\
ambulant~~~巡回する\\
meule~~~回転砥石\\
abri~~~保護物、格納庫\\
d\'emontable~~~分解出来る\\
baladais~~~持ち歩く\\
clochette~~~鈴\\
\\
~~~Mariette, (impressionn\'ee.) Non?\\
~~~Tabaroux. C'est comme j'ai l'honneur.\\
~~~Mariette. Mais voyons, il aurait fallu \'enorm\'ement d'argent!\\
~~~Tabaroux. Il en fallait, mais pas tellement. J'achetais d'occasion un camion de livraison. J'en ai vu des quantit\'es. On a \c{c}a, pour vraiment pas cher. Avec Emile, on r\'evisait le moteur, on d\'ecoupait des fen\^etres dans la carrosserie. Bourdon bricolait toute la menuiserie int\'erieure. Des jolis petits volets, un lit et une table qui se relevaient sur les c\^ot\'es, des caisses, des \'etag\`eres, les montants de l'abri d\'emontable. On te peignait tout l'int\'erieur de l'appartement en gris clair avec des filets bleus. On garnissait le plancher avec du linol\'eum \`a petits carreaux blancs et noirs. Tu n'avais plus qu'\`a poser les rideaux.\\
\\
camion de livraison~~~配送車\\
carrosserie~~~車体業者\\
bricolait~~~日曜大工をする、素人仕事をする\\
menuiserie~~~木工細工\\
filets~~~網\\
\\
~~~Mariette, (d\'esol\'ee.) Henri! Pourquoi ne m'as-tu pas dit!\\
~~~Tabaroux. Tu sais, dans les derniers temps, j'ai \'et\'e dix fois sur le point de t'en parler. Je me suis retenu. Je me suis dit: Tant qu'\`a faire, allons jusqu'au bout; qu'elle ait la surprise. Tout de m\^eme, la premi\`ere fois que tu es venue \`a la prison, j'ai voulu te d\'eballer mon histoire. Et puis voil\`a que tu as commenc\'e \`a me questionner, \`a me soup\c{c}onner, \`a m'accuser! Alors, non, impossible!... Bon Dieu! Tu n'aurais pas pu attendre que je parle?\\
\\
d\'eballer~~~ぶちまける\\
\\
~~~Mariette. Attendre! Alors que tu n'avais rien dit pendant des mois! Je t'en voulais. Avoue qu'il y avait de quoi! Pas tellement \`a cause de l'argent, mais de t'\^etre cach\'e de moi et si longtemps. (Un silence.) Maintenant je t'en veux peut-\^etre autrement, mais tout autant. Comment as-tu pu t'imaginer qu'en me mettant au courant tu aurais fait moins d'\'economies? Je peux t'assurer que tu en aurais fait, que nous en aurions fait davantage!\\
~~~Tabaroux. Tu dis \c{c}a maintenant. Et puis, va, on ne pouvait gu\`ere en faire davantage!\\
~~~Mariette. Si, si! Beaucoup plus. Chaque privation m'aurait rendue joyeuse. au lieu d'aller au cin\'ema, on aurait parl\'e de la roulotte, on aurait regard\'e les routes et les pays sur les cartes. Le bonheur d'esp\'erer une telle chose, d'y penser tous les jours, tu l'as gard\'e pour toi tout seul. Et tu trouvais encore le moyen de n'\^etre pas content.\\
~~~Tabaroux. C'est vrai, Mariette. J'\'etais impatient. Je ruais dans les brancards. (Un temps.)\\
\\
ruais dans les brancards~~~食ってかかる、反抗する\\
ruer~~~後足で蹴る\\
\\
~~~Mariette. Mais tu crois vraiment qu'on aurait pu gagner assez pour vivre?\\
~~~Tabaroux. Et bien vivre. J'en suis s\^ur. J'avais plut\^ot \'etudi\'e tout \c{c}a de pr\`es.\\
~~~Mariette. C'est qu'une voiture, il lui faut de l'essence, des pneus! \c{C}a doit co\^uter horriblement cher.\\
~~~Tabaroux. J'avais tout calcul\'e.\\
~~~Mariette. Et... tu avais encore beaucoup \`a \'economiser pour...\\
~~~Tabaroux. J'avais assez. \c{C}a y \'etait juste, je pouvais marcher. Enfin, nous aurions pu partir.\\
~~~Mariette. Tu achetais la voiture?\\
~~~Tabaroux. Oui, je l'aurais achet\'ee, avec toi, bien entendu. Mais voil\`a que ce n'est plus la peine...\\
~~~Mariette, (troubl\'ee, l'interrompant.) Si! Tu dois le faire, Henri! Il faut que tu le fasses... Ce n'est pas moi, bien s\^ur, qui t'emp\^echerai de le faire! Puisque je t'ai dit que je ne voulais pas de cet argent... (Elle repousse l'eveloppe.)\\
~~~Tabaroux, (souriant.) Laisse-moi donc continuer, mon petit! Tu ne sais pas ce que je veux dire. Ce n'est plus la peine d'acheter la roulotte, et je n'ai presque plus besoin d'argent parce que mon projet n'est plus rien \`a c\^ot\'e de ce que j'ai trouv\'e ou plut\^ot de ce qu'Emile m'a trouv\'e.\\
~~~Mariette, (trahissant un regret.) Ah!\\
~~~Tabaroux. C'est dix fois, cent fois plus \'epatant! C'est une chose qui nous a fait envie bien souvent, \`a toi et \`a moi, mais que je n'aurais jamais crue possible!\\
~~~Mariette, (anxieuse.) Quoi?\\
~~~Tabaroux. Une p\'eniche, Mariette! On va m'installer, marinier, sur une p\'eniche. La belle vie sur l'eau! Tu te rends compte?... Tu ne trouves pas \c{c}a merveilleux?\\
\\
p\'eniche~~~川舟、伝馬船\\
marinier~~~船頭、船員\\
\\
~~~Mariette, (triste.) Si...\\
~~~Tabaroux, (apr\`es l'avoir observ\'ee.) Voil\`a comment c'est arriv\'e; il y a un bon copain d'Emile qui a un oncle. Cet oncle, il est propri\'etaire de trois p\'eniches, qui se baguenaudent \`a longueur de mois, sur les fleuves et les canaux, avec du charbon, du ciment, des tuiles, ou du bl\'e ou des phosphates. Sur chacune d'elle il y a un m\'enage. C'est la r\`egle.\\
\\
baguenaudent~~~散歩する、ぶらつく\\
phosphates~~~リン酸カルシウム(肥料)\\
\\
~~~Mariette. Ah?\\
~~~Tabaroux. Un marinier ma\^itre \`a son bord et sa femme qui l'aide. Naturellement, s'ils ont des gosses, ils ne les laissent pas \`a terre. Sur l'une de ces trois p\'eniches, il y avait un vieux avec sa vieille. Ils vivaient comme \c{c}a sur l'eau depuis l'enfance. Et voil\`a que la vieille est morte. alors, c'est fini pour le vieux; il ne veut plus naviguer. D'ailleurs, il est temps qu'il se repose. Mais pour le remplacer, impossible. \c{C}a t'\'etonnera peut-\^etre, mais il para\^it qu'on n'en trouve plus pour mener cette belle vie-l\`a. Ils pr\'ef\`erent poin\c{c}onner les tickets dans le m\'etro. Le copain \`a Emile, il m'a donc propos\'e. Emile en a eu l'id\'ee pendant que j'\'etais en prison. C'est m\^eme parce que j'y \'etais qu'il a mis tant d'ardeur \`a goupiller la chose. Il connaissait mes go\^uts, tu comprends, il voulait m'offrir une grande consolation. Il faut dire aussi que la roulotte lui faisait un peu peur. Tu sais comme il est timide; c'est un gars qui restera toujours sur le trottoir. Bref, le copain m'a pr\'esent\'e \`a son oncle. Ah! \c{c}a n'a pas \'et\'e tout seul. On n'est pas marinier du jour au lendemain. C'est un m\'etier assez savant. Il faut conna\^itre la manoeuvre, les canaux, le chargement, les questions de fret et bien d'autres choses encore.\\
\\
poin\c{c}onner~~~打ち抜く\\
du jour au lendemain~~~あっという間に\\
\\
~~~Mariette. Et alors?\\
~~~Tabaroux. Alors, comment que je me suis cramponn\'e! Je lui ai fait de l'\'eloquence, \`a l'oncle! Au bout d'une heure il m'a eu \`a la bonne. Il a bien vu que j'avais la vocation, que j'avais soif de m'instruire. On a trouv\'e une solution. Le vieux marinier continue avec moi, le temps qu'il faudra pour m'apprendre. Je ferai tout \`a sa place; il n'aura qu'\`a commander.\\
~~~Je l'ai vu, on se pla\^it d\'ej\`a bien. C'est le meilleur des vieux fumeurs de pipe en terre. Et j'ai vu aussi la p\'eniche; elle est au quai de la Rap\'ee, propre et coquette et toute vernie.\\
\\
cramponn\'e~~~うるさくつきまとう、しがみつく、かじりつく\\
\\
~~~Mariette. Il y a une petite maison dessus?\\
~~~Tabaroux. Comment donc! Une belle carr\'ee, blanche et brune avec une fen\^etre bien mignonne sur chaque c\^ot\'e et deux par devant. Il y a encore la porte du milieu avec un petit escalier de coup\'ee. A l'int\'erieur un fourneau avec ses cuivres bien astiqu\'es; et sur le toit une caisse \`a fleurs blanche et verte, avec des g\'eraniums et des capucines.\\
\\
coup\'ee~~~舷門(?)、裁断された(?)\\
astiqu\'es~~~磨く\\
\\
~~~Mariette, (apr\`es un silence.) Mais ce vieil homme, il est encore l\`a chez lui et tant qu'il y sera, il gardera sa petite maison.\\
~~~Tabaroux. Non... Non, il veut me la laisser. Parce que sa femme n'y est plus. Il s'installera l\`a o\`u on logeait les chevaux quand il y en avait encore pour le halage. C'est grand et l'on peut am\'enager \c{c}a tr\`es bien. (Un temps.) Il faut dire aussi Mariette que... enfin que je n'ai pas encore os\'e dire que je n'aurais pas ma femme avec moi. (Mariette fond brusquement en larmes. Tabaroux s'approche d'elle doucement et la blottit contre lui.)\\
\\
halage~~~引き舟\\
blottit~~~身体をすり寄せる\\
\\
~~~Mariette, (pleurant.) Emm\`ene-moi!\\
~~~Tabaroux. Bien s\^ur! Bien s\^ur, que je t'emm\`ene, mon hirondelle! Trop heureux! Il n'y a pas de quoi pleurer.\\
(Mariette se redresse, sourit dans ses larmes, s'essuie les yeux. Tabaroux et elle se regardent, puis s'\'etreignent et s'embrassent.)\\
~~~Mariette. Henri!\\
~~~Tabaroux. Quoi, ma petite?\\
~~~Mariette. Si je n'avais rien dit, tu ne m'aurais pas demand\'e de partir avec toi?\\
~~~Tabaroux, (enjou\'e.) Non! Mais je t'aurais dit que je ne pouvais pas m'embarquer tout seul. Qu'il fallait d'abord que je me remarie et que je n'en avais aucune envie.\\
~~~Mariette, (tendrement.) M\'echant!\\
~~~Tabaroux, (de m\^eme, la lutinant.) Belle petite horreur! Dis, est-ce que tu as cru vraiment que tu me quittais?\\
\\
lutinant~~~(女性の胸、腰などに触って)からかう\\
\\
~~~Mariette. Oh! par moments, j'arrivais bien \`a me le faire croire!\\
~~~Tabaroux. Moi, je ne l'avais jamais tant cru que tout \`a l'heure, en arrivant, avec ton histoire de boutique!\\
~~~Mariette. Moi, quand j'ai re\c{c}u ton pneu, \c{c}a m'a donn\'e un coup. Comme si c'\'etait toi qui m'annon\c{c}ais que tu voulais me quitter.\\
~~~Tabaroux. \c{C}a, alors!\\
~~~Mariette. Bien s\^ur, tu acceptais si facilement que je te quitte!\\
~~~Tabaroux. Penses-tu! Je m'amenais avec ma roulotte, une p\'eniche et... une jardini\`ere...\\
~~~Mariette, (riant.) Tu es malin comme une mouche!... N'emp\^eche que sans la p\'eniche je n'aurais jamais su comment te dire de m'emmener.\\
~~~Tabaroux. Tu l'aurais dit sans le dire. La p\'eniche, c'est tout de m\^eme quelque chose, avoue!\\
~~~Mariette. Oh! oui... Mais ce n'est pas seulement \`a cause d'elle.\\
~~~Tabaroux. Je t'ach\`eterai un fauteuil d'osier. Tu t'installeras sur le pont et tu ourleras des serviettes comme une princesse sur son "ousbotte" (House-boat) en regardant d\'efiler les peupliers, les villages et les provinces.\\
\\
ourleras~~~かがる、まつる、縁取りをする\\
\\
~~~Mariette, (ravie.) Oh! (Inqui\`ete soudain.) Mais dis, est-ce qu'on navigue aussi la nuit?\\
~~~Tabaroux. Jamais! On s'arr\^ete \`a un bon endroit, pr\`es d'un petit patelin, avant la fin du jour. On amarre la p\'eniche, on pose une passerelle. Moi, je sors mes lignes. L'air est doux, le vent est tomb\'e, c'est l'heure o\`u \c{c}a mord. Il y a de l'ablette qui saute, en veux-tu en voil\`a. Pendant que je fais une livre de friture, toi, tu vas chercher ton lait au village.\\
\\
patelin~~~村、地方\\
amarre~~~係留する、繋ぐ\\
passerelle~~~歩行橋、タラップ\\
mord~~~mordre~~~(魚が餌に)食いつく、噛む、齧る\\
ablette~~~鯉科の淡水魚、ブリーク\\
friture~~~揚げ物、フライ\\
\\
~~~Mariette, (pousuivant.) En traversant une prairie o\`u je cueille un gros bouquet de reines-des-pr\`es, et un de colchiques pour ma jardini\`ere.\\
\\
reines-des-pr\`es~~~西洋ナツユキソウ\\
colchiques~~~イヌサフラン\\
\\
~~~Tabaroux. Et puis, dis donc, les matins d'\'et\'e, on se l\`eve avec le soleil. Il y a de la vapeur qui se tra\^ine sur l'eau, d'un gris rose. On dirait que le fleuve a fait, lui aussi, la pose pendant la nuit. Il a du mal \`a d\'emarrer. Sans un paquet d'herbe qui passe, tu ne verrais pas le sens du courant. Le vent n'est pas encore arriv\'e, les arbres ont l'air d'attendre les \'ev\'enements. Si, de l'autre rive, l\`a-bas, un p\^echeur lance sa ligne \`a brochet, tu entends son bouchon qui fait: floc. Si un gars monte dans son bachot, ou si une pie se met \`a rigoler, \c{c}a fait un vaste bruit, comme un scandale. Toi, tu apportes les bols et la cafeti\`ere sur le pont du bateau... \\
\\
brochet~~~カワカマス\\
bachot~~~渡し船、平底の小舟\\
pie~~~カササギ\\
\\
~~~Mariette, (l'interrompant.) Il y a une petite table?\\
~~~Tabaroux. Bien s\^ur. Et tu vois la cime du plus haut peuplier qui commence \`a se dorer. Il t'arrive une odeur de foin et d'eau, tu sais? comme \`a Meulan.\\
\\
foin~~~干し草\\
\\
~~~Mariette. Oui...\\
~~~Tabaroux, (confidentiel.) Dis donc, \c{c}a vaut bien l'odeur d'un magasin de parfumerie.\\
~~~Mariette. Henri! Tais-toi.\\
~~~Tabaroux. On n'en parlera plus. Mais soyons s\'erieux, ma belle petite dame! Quand veux-tu t'en aller d'ici?\\
~~~Mariette. Maintenant! Tout de suite!\\
~~~Tabaroux. Ma pauvre hirondelle, tu dis cela comme si tu venais de faire aussi de la prison!\\
~~~Mariette. Non, tout de m\^eme, je n'en ai pas fait, mais je me sentais constamment menac\'ee d'en faire.\\
~~~Tabaroux. Tu m'\'etonnes! Alors cette grande vie? L'\'el\'egante cage \`a serins avec la boule d'argent, la balan\c{c}oire, l'\'echaud\'e, l'abonnement au mouron?\\
\\
serins~~~カナリヤ\\
\'echaud\'e~~~熱湯を通した\\
abonnement~~~定期的な購入\\
mouron~~~ルリハコベ\\
\\
~~~Mariette. Tais-toi!\\
~~~Tabaroux, (l'embrasse et se l\`eve.) Mets-leur vite un mot. Dis-leur simplement qu'ils ne t'attendent pas ce soir.\\
~~~Mariette. Seulement \c{c}a?\\
~~~Tabaroux. Ils comprendront tout de suite. Tu pourras toujours leur \'ecrire demain... je ne sais pas, quelque chose \`a leur port\'ee; que nous avons gagn\'e le gros lot.\\
~~~Mariette, (riant.) Nous aussi?\\
~~~Tabaroux. Pourquoi "nous aussi?" Ils ont gagn\'e le gros lot?\\
~~~Mariette. Oui! Enfin, ils ont gagn\'e un lot, pas si gros que le n\^otre.\\
~~~Tabaroux, (qui se trouve pr\`es du secr\'etaire.) Viens ici. Tiens! Il y a justement une feuille de papier toute pr\^ete. (Rire de Mariette.) Pourquoi ris-tu?\\
~~~Mariette, (s'installant au secr\'etaire.) Pour rien. Je t'expliquerai. D\'ep\^echons-nous. Toi, mon ch\'eri, tu fourres cette enveloppe dans ta poche et tu remets la jardini\`ere dans son papier. Oh! je l'aime, tu sais! Elle est tellement plus belle que l'autre. Fais attention \`a ne pas la casser.\\
~~~Tabaroux, (empaquetant la jardini\`ere.) Celle-l\`a, pas de danger. Quant \`a l'enveloppe, elle est \`a toi.\\
~~~Mariette. A nous. Mets-la dans ta poche c'est plus s\^ur. (Elle \'ecrit \'enon\c{c}ant au fur et \`a mesure.) Ne m'attendez pas ce soir et ne vous inqui\'etez pas de moi. (Tandis que Tabaroux ach\`eve soigneusement son empaquetage, Mariette court \`a la salle \`a manger, en rapporte la jardini\`ere qu'elle pose sur la table, puis, entre les fleurs artificielles, elle dresse le papier sur lequel elle vient d'\'ecrire.) Voil\`a!\\
~~~Tabaroux, (devant les fleurs.) Zut, alors! C'est \`a vous d\'ego\^uter de la chicor\'ee fris\'ee. Mais ton papier ne fait pas mal. Alors, Mariette, on y va? (Il lui prend la main.)\\
\\
chicor\'ee fris\'ee~~~チコリ、キクジシャ\\
\\
~~~Mariette, (se d\'egageant.) Dans trois minutes, le temps de rassembler mes petites affaires. (Elle court vers la porte de gauche.)\\
~~~Tabaroux. Ils finiront par rappliquer, tu sais. Je suis depuis un moment.\\
\\
rappliquer~~~(不意に)戻る\\
\\
~~~Mariette, (\`a la porte de gauche.) Rien \`a craindre. (Elle franchit la porte, mais revient aussit\^ot.) A propos, Henri, pour le cas o\`u je l'oubierais, fais-moi penser qu'avant de partir, je dois ouvrir la fen\^etre toute grande.\\
~~~Tabaroux. Pourquoi?\\
~~~Mariette. C'est un signal, convenu avec eux.\\
~~~Tabaroux, (allant ouvrir la fen\^etre.) Ah! j'y suis! \c{C}a voudra dire que l'hirondelle s'est envol\'ee!\\
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~(Rideau.)\\
\\
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~(1938.)\\






}
\end{document}